A retenir dès maintenant sur vos agendas : du 21 au 23 octobre 2022 à Rochefort en Charente Maritime, 3ème édition du Festival des Mémoires de la Mer, une édition spéciale « Tempête »

A retenir dès maintenant sur vos agendas : du 21 au 23 octobre 2022 à Rochefort en Charente Maritime, 3ème édition du Festival des Mémoires de la Mer, une édition spéciale « Tempête »
C’était une première : le 20 juin dernier, au lendemain du 2ème tour des élections législatives, avant même le début de la session parlementaire, les députés se sont vu proposer par un collectif de scientifiques une formation express aux enjeux écologiques, notamment à la crise climatique et à l’érosion de la biodiversité.
Belle initiative qui pourrait utilement en susciter d’autres, par exemple sur les enjeux maritimes de la France. On ne saurait trop à cet égard recommander aux candidats formateurs de s’appuyer sur un livre de référence publié en avril dernier aux Editions Pedone : « L’Atlas des espaces maritimes de la France ».
Un Atlas dont le nouveau Secrétaire d’Etat à la Mer serait bien inspiré, en tout cas, de faire son livre de chevet !
Comme l’écrit dans sa préface le professeur Alain Pellet, cet atlas est beaucoup plus qu’un atlas : « une somme de connaissances, une « encyclopédie…, une double somme, très impressionnante portant à la fois sur les espaces maritimes relevant de la République française et les restes insulaires de feu son empire colonial. »
La géographie nourrit toute l’approche du livre en mettant en perspective – et en question(s) – la dimension exceptionnelle du domaine maritime de la France, le deuxième du monde après celui des Etats-Unis avec 10 millions de km².
Cette reconstitution par l’océan d’un nouvel empire français est l’enfant improbable de la mutation profonde du droit de la mer à la fin du siècle dernier et du maintien de la souveraineté de la France sur des îles dispersées dans tous les coins de la planète qui « donnent » à notre pays 95 % de son territoire maritime.
La convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 a , en effet, selon l’expression d’ Alain Pellet, « considérablement accru « les possibilités d’une île » et bien qu’elle ait au départ un peu traîné les pieds, la France a assez rapidement réalisé tout le parti qu’elle pouvait en tirer ».
La France des diplomates et des juristes – appuyée sur l’expertise de ses géographes – y a pris toute sa part. L’Atlas détaille, cartes à l’appui, les combats pacifiques menés sous nos couleurs, hier et aujourd’hui, sur tous les océans du globe. Car la France compte aujourd’hui 39 frontières maritimes avec 30 pays dont seulement 5 se situent aux abords du territoire métropolitain : autant de frontières, autant de délimitations à définir et à valider !
Pourtant partie prenante, pour beaucoup, au combat pour la défense de nos nouvelles frontières, les auteurs – un collectif de juristes et de hauts fonctionnaires sous la direction d’Alina Miron et de Denys-Sacha Robin – n’en dissimulent pas les fragilités qui sont autant de défis pour nos gouvernants : « Eclatement, éloignement, dispersion et origines coloniales de ce domaine maritime, sont autant de facteurs importants de faiblesse auxquels il importe de confronter les acteurs politiques nationaux. »
Fernand Braudel, cité par l’un des auteurs, écrivait dans l’Identité de la France, que « la frontière a dévoré l’histoire de France » en raison des efforts que sa formation et sa défense ont exigés de l’Etat. En sera-t-il ainsi demain pour nos frontières maritimes ?
Alain Pellet dans sa préface, aborde la question sans détour : « On peut lire, répété à satiété que grâce à nos territoires d’outre-mer, l’espace marin français est le deuxième du monde après celui des Etats-Unis. Soit ! Et alors ? Bien sûr qu’il y a des enjeux économiques et stratégiques mais pour « la grande puissance moyenne » qu’est notre pays la conservation et le contrôle de ces immenses espaces maritimes sont-ils nécessaires ? utiles ? voire raisonnables ? »
L’Atlas apporte à ce débat un éclairage historique stimulant sous la plume de Cyrille Coutansais pour qui la France est au troisième carrefour maritime de son histoire. Par deux fois, rappelle t’il, notre pays a raté son rendez-vous avec l’océan, en se repliant sur son horizon immédiat plutôt que de s’ouvrir sur le grand large. L’auteur écarte l’hypothèse d’un prétendu atavisme terrestre et met l’accent, preuves à l’appui, sur la responsabilité des gouvernants. Qu’en sera-t-il aujourd’hui ? L’histoire se répètera t’elle ? En tout état de cause, après la publication de cet « Atlas des Espaces Maritimes de la France », nos gouvernants ne pourront pas dire : « nous ne savions pas ».
Benedict Donnelly
Intrigué ! Yann Mauffret, le patron du chantier du Guip, « la » référence des charpentiers de marine, me confiait tout récemment son étonnement de l’attachement quasi charnel des équipiers de l’Hermione à « leur » frégate. Un attachement qui nous avait, nous aussi, pris par surprise au retour du voyage américain de l’Hermione, il y a 7 ans déjà.
Préfaçant le livre de Francis Latreille et d’Hervé Gaubert « L’Hermione dans le sillage de Lafayette » paru en 2015 chez Gallimard, j’évoquais « la singularité d’une aventure humaine exceptionnelle, celle de l’équipage de l’Hermione… Un équipage associant marins professionnels et volontaires bénévoles… qui avait suscité l’admiration de tous par son enthousiasme, son engagement, sa rigueur et sa cohésion. »
Dieu sait pourtant que nous n’étions guère emballés à l’idée de devenir nous-même armateurs de l’Hermione à l’issue d’un chantier qui avait duré dix-sept ans !
Nous voulions, comme pour la construction du navire, nous appuyer sur l’expertise d’entreprises spécialisées. Aucune compagnie française de navigation n’ayant voulu prendre le risque de constituer et de gérer un équipage mêlant marins professionnels et amateurs, nous nous étions, au final, résignés à piloter nous-mêmes les navigations de l’Hermione.
Sans nous douter que, 30 ans après le lancement du projet, 10 ans après la mise à l’eau de la frégate, une génération de jeunes volontaires, marins de circonstance pour beaucoup, se serait identifiée à cette formidable machine à remonter le temps qu’est l’Hermione au point de l’incarner et de reléguer au second plan sa dimension patrimoniale ! Cette « génération Hermione » est, depuis quelques semaines, un peu moins énigmatique grâce à la bande dessinée de Guillaume Tauran « Une vie de gabier à bord de l’Hermione » aux Editions Paquet.
Guillaume Tauran a été, trois ans durant, à bord de l’Hermione, un « gabier » , en clair un matelot mobilisable à tout moment et par tous les temps pour monter dans la mâture à plusieurs dizaines de mètres de hauteur et manœuvrer les voiles. Ils sont soixante, à bord de l’Hermione, hommes et femmes, tous bénévoles, aux côtés d’une vingtaine de marins professionnels. A la différence de navires historiques plus récents comme le Belem qui date de la fin du 19 ème siècle ou de répliques approximatives conçues pour le cinéma ou les relations publiques, l’Hermione, réplique authentique d’une frégate du 18 ème siècle, exige en navigation un équipage nombreux et impose des manœuvres à risque. Contraints et forcés, nous avons donc dû inventer, en nous appuyant sur un commandant d’exception, Yann Cariou, un modèle original de recrutement, de formation et d’apprentissage des gabiers de l’Hermione. Et, ce faisant, au fil de l’eau, sans que nous l’ayons vraiment anticipé, l’Hermione est devenue pour des dizaines de jeunes de tous horizons, géographiques et sociaux, une véritable école de vie.
Guillaume Tauban dévoile, dans sa BD, les ressorts de la passion des gabiers pour « leur » frégate, en racontant par le dessin et par la plume leur quotidien à bord de l’Hermione. C’est le récit d’un périple comparable à celui des artisans compagnons accomplissant leur tour de France pour perfectionner leurs connaissances et enrichir sur le terrain leur expérience du métier. Sauf que ce « tour » se fait ici au large, en pleine mer, balloté par le vent et les vagues à des hauteurs vertigineuses !
Ce récit manquait, tout comme ce regard de l’intérieur sur la vie à bord d’un grand voilier d’autrefois avec les yeux d’aujourd’hui
Merci, Guillaume !
Benedict Donnelly
1- Silence en Méditerranée
Réalisateurs : Jean-Charles Granjon
Production : Bleuearth production, 2021, 52 minutes
Une odyssée sensorielle au cœur de la biodiversité marine.
Le biologiste et cinéaste sous-marin, Jean Charles Granjon, nous propose une odyssée maritime et sensorielle en Méditerranée. Il pose la question du son dans le milieu marin, évoquant l’absence de pollution sonore anthropique et ses conséquences pendant le confinement.
À notre époque, le silence humain est rare. Pendant le premier confinement sanitaire en mars 2020, et pour la première fois, la vie semble s’arrêter. Moins de voiture sur les routes, moins de bateaux en mer et aucun avion dans le ciel. Un silence et un calme olympien. Une expérience incroyable et une occasion pour les humains que nous sommes, d’observer la nature et y prêter une attention toute particulière.
Sur le littoral, des spécialistes marins décident d’étudier les conséquences de ce silence exceptionnel sur la faune et la flore méditerranéenne. Des micros sont posés dans la mer.
Du silence, émerge alors un chant. C’est celui du monde sauvage. Il utilise le son pour communiquer et se repérer. Nous découvrons des images sous-marines exceptionnelles et des séquences inédites, comme celles où l’on entend le chant d’amour des corb imitant le bruit des tambours, ou les clics et échos des cachalots. La beauté de la nature à l’état pur.
Le cinéaste sous-marin Jean-Charles Granjon, décide de partir à la rencontre de ces spécialistes, pour observer leurs outils de mesure, écouter leurs analyses et comprendre les enjeux. Il embarque sur un voilier, celui du projet We Ocean, et nous entraine dans une odyssée sensorielle inédite.
2 – Les harmonies invisibles
Réalisateurs : Laurent Marie et Vincent Marie
Coproduction Les Films de la pluie, Adala Films, 77 minutes
Imprégnés par les contes arctiques qui ont bercé leur enfance, deux frères, Laurent, apnéiste, et Vincent, cinéaste, partent sur les traces de la légende du narval. En chemin ils rencontrent le peuple inuit avec qui ils vont partager une quête poétique de respiration avec le monde.
En découvrant ce documentaire, ce qui vous touche d’abord c’est la sensation de sérénité qui s’en échappe. Rien n’est en trop, le récit est fluide, les images sont sublimes, la glace omniprésente. Ce film propose une immersion inédite dans le monde secret des Inuits et de leurs légendes qui porte le spectateur vers l’imaginaire et la contemplation. Rien dans ce monde du froid ne ressemble à nos vies soi-disant moderne. On y trouve ce qui nous manque souvent : la rêverie, la poésie, le silence. Ici, peu de mots pour comprendre l’indicible. On prend le temps d’observer tous les détails d’un sourire que l’on suit de son éveil à son coucher sur le visage creusé d’une vielle âme Inuite. Dans ce premier long
métrage, rien n’est exploit, sensationnel ou extrême, tout est à la mesure du décor unique que représente l’Arctique, apaisé et serein. On s’extrait de ce film en ayant envie d’en connaître plus sur la paix intérieure qui anime son héros apnéiste. Son humilité, son osmose intérieure semble correspondre si bien à l’harmonie indispensable à la survie de ces hommes des glaces. Un documentaire nécessaire, original et qui redonne du souffle.
3 – Au nom de la mer
Réalisateurs : Jérôme et Caroline Espla
Production : Via Découverte — 13 Productions — 2021, 52 minutes
La France est le plus important producteur de déchets plastiques de la Méditerranée. Cent milliards d’emballages sont jetés chaque année par les Français, soit presque 5 millions de tonnes, l’équivalent de 70kg par personne. Et seulement la moitié de ces emballages sera recyclée. Le reste finira dans une décharge, dans un incinérateur, dans la nature, et malheureusement en mer.
Le joyau exceptionnel de biodiversité marine qu’est la Méditerranée, s’asphyxie doucement,
submergée chaque année par 600 000 tonnes de plastiques et de macrodéchets en tout genre, dont 10 000 tonnes sont rejetées par la France.
Le désespoir et le découragement gagnent du terrain dans la conscience de l’homme mais parfois il ne peut rester indifférent face à l’immensité du drame. Seuls, ou en petits groupes, ils sont lanceurs d’alerte, nettoyeurs des mers, défenseurs de la vie marine. Avec leurs moyens, ils sont persuadés qu’il n’est pas trop tard pour agir. Entre Corse et Côte d’Azur, voici le parcours de ceux qui agissent au nom de la mer.
4 – Thomas Ruyant : À la conquête du Vendée Globe
Réalisateur : Thomas Sametin
Production : Air Vide et Eau Productions — 2021, 52 minutes
À l’occasion du Vendée Globe 2020/21, ce film-documentaire retrace l’aventure entrepreneuriale du skipper Thomas Ruyant.
Depuis la genèse du projet jusqu’à l’arrivée à la 6″ place du Vendée Globe le 28 janvier dernier, l’histoire nous est contée à travers des flashs-back tournés durant les 4 années de préparation et au fil du tour du monde, ainsi que des interviews des protagonistes {boat captain, co-skipper, partenaire, association).
L’occasion de découvrir les coulisses d’un défi humain, sportif, technologique et sociétal. Une épopée entrepreneuriale riche de rencontres, d’apprentissages, de réussites et de résilience !
5 – Mor Diouf, marin entre deux mondes
Réalisateurs : Erwan Le Guillermic et David Morvan
Production : Aligal Production — 2021, 52 minutes
Mor Diouf, marin sénégalais, a obtenu son diplôme pour devenir patron de pêche. Il attend avec espoir d’être naturalisé pour prendre les commandes du chalutier français sur lequel il travaille depuis des années.
Ce beau film dresse le portrait du premier africain à devenir capitaine de pêche en France et souligne les contradictions entre son Sénégal natal, où il n’y a plus suffisamment de poissons pour faire vivre les pêcheurs et les oblige comme Mor à l’exil, et la France où il n’y a plus suffisamment de matelots pour armer les navires.
6 – Des sauveteurs et des hommes
Réalisateurs : Thierry Durand
Production : Aligal Production — 2021, 53 minutes
AU cœur du sauvetage en mer avec ces femmes et ces hommes à terre et sur l’eau qui veillent et sauvent des vies humaines.
Ils s’appellent Yoann, Stéphane, Mickaël, Vincent. Ils sont : patron d’un canot de sauvetage SNSM, pilote de l’hélicoptère de la Marine Nationale, commandant de l’Abeille Liberté ou chef de quart au CROSS Jobourg. Bénévoles ou professionnels, civils et militaires, ils sont les visages et les voix derrière les numéros d’urgence en mer : le 196 sur le téléphone ou le canal 16 de la VHF.
7 – Cachalots, une histoire de famille
Réalisateurs : René Heuzey, François Sarano et Guillaume Vincent
Coproduction : Les Films en Vrac Production et Label Bleu Productions, 2021, 52 minutes
C’est l’histoire vraie d’une famille de titans : une trentaine de cachalots, quinze femelles et onze petits qui vivent au large de l’Ile Maurice, auxquels s’ajoutent les grands mâles qui reviennent de longs mois de chasse dans les mers australes.
Grâce à des centaines d’heures d’images filmées pendant près de dix ans, nous allons vivre au milieu d’eux, révéler le fonctionnement du clan, les différentes fonctions sociales des femelles, l’importance insoupçonnée des mâles.
Et suivre leurs destins hors du commun, avec leurs joies, leurs moments de tendresse, leurs drames.
8 – Océans 3, la voix des invisibles — une drôle de guerre
Réalisateur : Mathilde Jounot
Production : Portfolio Production, 2021, 1H15min
Les océans doivent-ils être gérés par les citoyens ou les marchés financiers ?
À la suite d’Océans 1, et d’Océans 2, Océans 3, la voix des invisibles s’attache cette fois à décrypter le développement des projets éoliens offshore. Quelles seront les conséquences environnementales, économiques et sociales de ces projets industriels sur les mers ?
9 – Méditerranée, la face cachée des volcans
Réalisateurs : de Gil Kebaïli et Roberto Rinaldi
Production : IGB Prod, 2022, 52 min
Du Nord de la Sicile jusqu’à la baie de Naples, une expédition scientifique menée par le vulcanologue italien Francesco Italiano et l’équipe de plongeurs de Laurent Ballesta spécialisée dans les plongées profondes va étudier les volcans en explorant des fonds enfouis à plus de 100m sous la surface. Sur les pentes englouties de la mer Méditerranée, ils vont sonder ces territoires pour tenter de découvrir des indices sur le fonctionnement de ces montagnes de feu cachées sous la surface, rencontrer des écosystèmes rares et secrets et des sources d’énergie jusqu’alors inaccessibles. Une aventure inédite à la découverte d’un monde presque inconnu et pourtant si proche des populations humaines
qui pourrait permettre à la science d’anticiper les réveils de volcans parmi les plus menaçants au monde.
10 – A la Ciotat, des navires et des hommes
Réalisateur : Emile Rozand
Production : ARTE, 2022, 14 minutes
Des géants des mers sortant d’une toute petite ville de pêcheurs, c’est le destin hors norme de La Ciotat, ville ancrée sur la Côte d’Azur à quelques encablures de Marseille. Fruit de l’amour des hommes pour la navigation et pour la mer Méditerranée, son chantier naval a donné naissance à des navires légendaires. Il a également forgé un état d’esprit fraternel et une âme de résistance.
Décédé brutalement, il y a quelques jours, à l’hôpital de Lisieux, Alain a été pendant 20 ans un des piliers de l’aventure de l’Hermione, des débuts du chantier au voyage américain.
A peine descendu de la passerelle de l’Hermione, Alain a pris la barre d’un projet enraciné dans « sa » région, la Normandie : la reconstruction à l’identique du bateau amiral de la flotte avec laquelle le duc de Normandie, Guillaume Le Conquérant, conquit l’Angleterre en 1066. Une reconstruction inspirée par la reproduction du navire sur la Tapisserie de Bayeux.
Coïncidence… le 5 janvier dernier, France 3 diffusait une émission spéciale des Racines et des Ailes sur » l’héritage fabuleux des Normands » . J’étais heureux pour Alain, hospitalisé depuis plusieurs semaines, que des millions de personnes puissent ce soir là, devant leur écran, mieux comprendre le sens de son projet. L’aventure de la Mora – c’est le nom du navire de Guillaume Le Conquérant – va continuer sans lui. Elle ira, j’en suis sûr, à son terme.
Et, de notre côté, nous nous battrons pour faire vivre le Festival des Mémoires de la Mer dont la 1ère édition s’était déroulée en 2019 sur ses terres normandes, à Fécamp.
Nous avions noué, Alain et moi, depuis 30 ans une complicité et une amitié nourries de projets et de réalisations partagées mais aussi de navigations amicales des deux côtés de la Manche avec Claire et Annyvone, nos compagnes. Des traversées de Manche : pour la régate, comme durant cette course Cowes-Deauville remportée ensemble, il y a bien des années, sur son voilier de l’époque, un Aphrodite 101; pour le plaisir aussi et la découverte des hauts lieux de l’histoire maritime britannique, à Portsmouth ou sur la Beaulieu River.
Un plaisir gâché, lors d’un week-end de l’Ascension, par un excès de zèle mal venu de la douane et de la gendarmerie maritime, débarquant brutalement de nuit au large de la baie de Seine, pour une fouille en règle de tous les recoins du Sun Fast 32, son nouveau voilier baptisé » Mora »…, et battant piteusement en retraite au bout de deux heures, incapables de justifier à l’avocat rigoureux qu’était Alain, la légalité de leur arraisonnement spectaculaire, mitraillettes au poing, projecteurs éblouissants et intimidations verbales par hauts parleurs à la clé.
On ne s’ennuyait jamais avec Alain Bourdeaux!
Il va sacrément nous manquer.
Benedict Donnelly
Le film lauréat des Mémoires de la Mer 2020 « Poisson d’or, Poisson Africain », réalisé par Moussa Diop et Thomas Grand était un cri d’alarme sur les conséquences de la surpeche industrielle chinoise au Sénégal.
Le réalisateur Frédéric Brunnquell en témoignait ainsi dans son commentaire :
« Poisson d’or, poisson africain porte la force de la découverte ethnologique dans ce qu’elle a de meilleur. Le film nous plonge dans le monde inconnu et saisonnier de la pêche à la sardinelle et de son exploitation au large des côtes sénégalaises. C’est un film absolu dont la précision puise dans le meilleur du grand reportage et y ajoute la justesse empathique et la compréhension fine du meilleur des documentaires. Nous découvrons les réalités complexes d’une communauté provisoire composée d’enfants, de femmes et d’hommes venus de toute l’Afrique de l’Ouest exploiter la ressource abondante en poissons des côtes de la Casamance.
Le film révèle que sur ces plages l’organisation complexe de ces pêcheries artisanales fait vivre toute une région qui s’étend sur plusieurs pays voisins. L’arrivée inéluctable de navires industriels et de la construction d’usines, à capitaux chinois, de farine de poissons menace tout cet équilibre économique à la sociologie si riche »
Le Monde du 12 janvier dernier, dans un article de Frédéric Bobin – « Au sud de Dakar, les ravages de la pêche chinoise » montre que la menace n’était pas imaginaire..
« A Mbour, à 70 km au sud de Dakar… les pêcheurs locaux estiment la chute de leur activité à deux tiers en dix ans. Les dégâts sociaux d’un tel recul ne peuvent être que sévères dans un pays où la pêche artisanale fournit autour de 600 000 emplois directs et indirects, soit 17 % de la population active. Les femmes impliquées dans la transformation de la ressource en « poisson séché » ou » poisson braisé « , aliments précieux car facilement conservables, figurent parmi les victimes collatérales de cet épuisement des ressources halieutiques. Et ce d’autant plus qu’elles doivent subir la concurrence d’usines d’huile de poisson- dont les chinois sont très friands pour leur aquaculture- qui prolifèrent sur le littoral atlantique de la Mauritanie à la Guinée-Bissau. »
Frédéric Bobin mettait en lumière les méthodes utilisées par la pêche industrielle chinoise pour contourner les réglementations locales : » Aucun accord de pêche n’ayant été signé entre Dakar et Pékin, les chalutiers chinois opèrent en général sous la couverture d’un prête-nom sénégalais enrôlé dans une société mixte. »
D’où les doutes sur la légalité de l’attribution des licences de pêche au Sénégal exprimée dans un rapport de Greenpeace Africa d’octobre 2020.
Plus troublant encore, une manipulation des données du système d’identification automatique (AIS) broulle la localisation des navires chinois… Dès 2016, un rapport de l’ONG Global Fishing Watch avait identifié les navires chinois comme coutumiers des localisations fallacieuses »
Décidément, le braconnage en mer à grande échelle ne se limite plus aux seuls navires pirates dénoncés par d’autres ONG comme Sea Shepherd ( Lire » A la poursuite du Thunder ») ni aux eaux internationales !
Benedict Donnelly
En Juillet prochain se tiendra à Lisbonne à l’initiative de l’ONU une conférence mondiale sur la protection de la biodiversité en haute mer. Un enjeu sur lequel les négociations préparatoires à la fameuse convention sur le droit de la mer adoptée à Montego Bay, il y a près de 30 ans en 1982, avaient échoué.
Pour mettre la pression sur ce dossier, la France organisera en février prochain à Brest une réunion internationale baptisée « One Ocean Summit ».
Peut-on vraiment croire à l’avènement demain d’un ordre mondial en haute mer ?
Dans une interview récente à l’hebdomadaire le Point, le chef d’état-major de la Marine, l’amiral Pierre Vandier s’alarmait de « la régression générale du droit » en mer comme plus largement dans tous les espaces communs de notre planète.
« Certains acteurs n’hésitent plus à imposer leur loi dans leurs zones maritimes proches, à chercher des ressources dans des fonds marins qui ne sont pas placés sous leur souveraineté, à saboter discrètement des navires de commerce ou encore à territorialiser des îlots qui ne leur appartiennent pas.
Ces comportements décomplexés tendent à transformer la mer, espace commun à tous régulé par le droit international, en une jungle où tous les coups sont permis… L’ordre mondial s’effondre à grande vitesse. Les garde fous qui tiennent encore face au désordre croissant ne sont plus très nombreux. »
Les propos du chef d’état-major de la Marine m’ont remis en mémoire le commentaire… rugueux de Guy Ladreit de Lacharrière, le chef de la délégation française à la Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, conclue par la Convention de Montego Bay en 1982.
Je reprends ici des extraits de sa conclusion du colloque organisée en 1983 par la Société Française de Droit International « Perspectives du droit de la mer à l’issue de la 3ème Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer. »
Une manière pour moi de saluer la mémoire de Guy de Lacharrière qui m’avait fait l’amitié de rejoindre le premier Conseil d’Administration du Centre International de la Mer, que j’avais créé en 1985 avec l’écrivain Paul Guimard, au cœur de la Corderie Royale de Rochefort.
« Les liens entre positions juridiques et intérêts nationaux ont été, à la Conférence du Droit de la Mer, d’une netteté, d’une transparence, voire d’un cynisme rarement rencontrés.
En écoutant un orateur, on pouvait définir les caractéristiques , en tout premier lieu géographiques, du pays qu’il représentait. Ce phénomène s’est présenté à la Conférence avec une clarté exceptionnelle. De surcroît, les intérêts nationaux qui se trouvaient derrière les positions juridiques étaient d’une nature telle qu’il était très difficile de compromettre à leur propos.
On a parlé beaucoup d’un devoir de compromis et chacun reconnaissait qu’il existait. Mais sur les intérêts en jeu il était très difficile de compromettre et tout d’abord parce qu’on ne compromet pas aisément avec la géographie, dont les données sont permanentes.
D’autre part, ce qui se passait à la Conférence du droit de la mer était très différent de ce qui se passe, disons, dans une conférence de négociations commerciales.
Dans une conférence de ce dernier type, on peut admettre, par exemple à propos de la stabilisation des prix des produits primaires, que certaines mesures bonnes pour les pays producteurs le seront aussi pour les pays consommateurs, de sorte que les intérêts des uns et des autres convergent.
Au contraire, les intérêts en présence à la Conférence du droit de la mer étaient tels que celui qui « gagnait » gagnait au détriment de celui qui perdait : si un pays était désormais en droit de pêcher tout le poisson de sa zone économique de 200 milles, son avantage était acquis au détriment des étrangers qui pêchaient jusque-là dans ces eaux, et il n’était pas possible de parler de prospérité de chacun contribuant à la prospérité de tous comme dans des négociations commerciales.
Le jeu joué à la Conférence est un jeu à somme nulle, où les gains des uns correspondent aux pertes des autres. Du moins c’est ainsi que pensaient les délégations, ce qui rendait les compromis fort malaisés. Autrement dit, il n’existait pas de mythe unificateur des intérêts permettant aux délégations d’être convaincues qu’en travaillant à l’intérêt commun, elles travaillaient aussi à leurs intérêts propres sur un grand nombre de domaines du droit de la mer comme l’étendue de la zone économique ou du plateau continental.
La transparence des liens entre intérêts nationaux et positions juridiques n’a pas été moins notable en ce qui concerne l’autre grand domaine du droit de la mer… : le domaine des institutions mondiales compétentes à l’égard des ressources des fonds marins internationaux.
Quand il a été admis qu’il s’agissait de créer une sorte de quasi-gouvernement mondial sur la moitié du globe, là encore la trop évidente adaptation des vues juridiques aux intérêts nationaux de ceux qui les présentaient a fait obstacle à un accord général sur des institutions dont l’importance était extrême en raison du domaine qui leur était attribué et du précédent qu’elles pouvaient constituer. Il s’est passé ce que l’on connait sur le plan interne, lorsque les partis politiques spéculent sur ce que pourraient leur rapporter les différents modes de scrutin. Raisonnant à propos des institutions mondiales à adopter, chaque délégation s’est rendue compte de ce qui allait se passer, de ce que les uns allaient gagner et de ce que les autres allaient perdre. Le mythe unificateur qui, là, pouvait peut-être être admis, n’a pas eu le temps de se dégager.
Dans sa dernière phase, la Conférence a voulu créer des institutions mondiales en abandonnant la logique du contrat social, en oubliant ses bonnes dispositions premières quant au respect des souverainetés et donc quant à l’usage du consensus qui en était l’instrument.
Au fond, à la fin de la Conférence, pour beaucoup de délégations, la volonté des autres est apparue comme agaçante… Pour des pays majoritaires dans une conférence, et même s’ils professent tous que le droit international trouve son fondement dans la volonté des Etats, la volonté des autres est agaçante ou irritante. A la Conférence du droit de la mer on a voulu court-circuiter, contourner cette volonté des autres en recourant au vote.
La grande leçon de la Conférence du droit de la mer tient en ceci que la volonté des Etats ne se laisse pas oublier ni contourner. Le droit international est, à l’heure actuelle, un droit négocié. Il y a toutes les raisons de s’en féliciter, sauf pour les partisans de la contrainte entre les nations. ».
Le Monde titrait le 4 novembre dernier « COP 26 à Glasgow : l’océan, grand oublié » au dessus d’un article de Martine Valo qui présentait ainsi l’état des négociations internationales sur la protection des océans.
« L’océan mondial ne figurait pas au programme des COP avant celle de Paris, en 2015. Sa timide apparition d’alors a donné lieu à la publication, quatre ans plus tard, du rapport spécial établi par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur « l’océan et la cryosphère dans le contexte du changement climatique ». Malgré l’ampleur saisissante des catastrophes annoncées, peu de décisions se sont ensuivies…
L’état de santé de l’océan se joue aussi sur d’autres scènes.
Au sein de l’Autorité internationale des fonds marins par exemple, où les Etats se préparent à exploiter les ressources minérales jusque dans les abysses. Ou encore à la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR).
Le 29 octobre, pour la cinquième année d’affilée, l’Union européenne et les vingt-cinq Etats qui y siègent ne sont pas parvenus au consensus nécessaire pour créer de nouvelles aires marines protégées dans l’océan Austral, sur lequel ils sont précisément chargés de veiller.
Du côté de l’Organisation des Nations unies, l’urgence à agir pose aussi question. Les négociations internationales sur un futur traité juridiquement contraignant pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer, au-delà des juridictions nationales, n’ont toujours pas abouti. Le lancement de ce processus remonte à 2012… »
Patrick Chaumette, Professeur émérite de l’Université de Nantes et Directeur de la publication du Dalloz « Droits Maritimes ».
« Concernant les ressources biologiques en haute mer, aucun instrument international ne traite des écosystèmes marins dans leur ensemble notamment au-delà des zones sous juridictions nationales, c’est-à-dire en haute mer et dans la colonne d’eau. Des négociations sont en cours au sein des Nations unies afin d’examiner les recommandations de 2017 du comité préparatoire. Il s’agit de combler des lacunes de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM), signée en 1982 à Montego Bay, quant à la préservation de la biodiversité et quant au statut des ressources génétiques des grands fonds marins. Ces dernières années ont révélé la richesse biologique de ces fonds ; si les prélèvements de ces ressources génétiques soulèvent peu de questions environnementales, il en va différemment du partage des avantages découlant de leur utilisation exclusive. »
Pascale Ricard, juriste en droit de l’environnement au Centre d’études et de recherches internationales et communautaires (CERIC), Aix-Marseille Université.
« J’ai commencé à m’intéresser au droit de la mer et à la biodiversité lors de mes études de master, puis j’ai consacré ma thèse à la question de la conservation de la biodiversité dans les zones maritimes internationales.
Ce sujet est passionnant pour plusieurs raisons. Tout d’abord, parce que les océans sont assez peu connus – moins que la surface de la lune –, alors qu’ils couvrent presque les trois quarts de la surface de la terre et constituent le berceau de la vie. Ensuite, parce que les mers et océans constituent des espaces communs que l’on peut qualifier de « biens publics mondiaux ».
Ce caractère commun implique un régime juridique très particulier qui diffère en grande partie des régimes juridiques applicables aux espaces terrestres, situés sous la souveraineté des États. Les États étant tous égaux et souverains, comment le droit peut-il assurer la protection d’espaces qui n’appartiennent à personne – ou bien à tous ?
Enfin, les océans sont caractérisés par leur continuité et connectivité physique et constituent pour certains scientifiques un seul et même écosystème. Néanmoins, le régime qui leur est applicable est caractérisé par une très forte fragmentation (géographique et juridique), ce qui semble a priori antinomique avec l’idée de continuité et constitue un facteur de complexité, à l’origine d’incohérences.
La biodiversité marine suscite un intérêt de plus en plus important, non seulement parce que de nombreuses espèces sont menacées de surexploitation, ce qui pose des problèmes en termes de sécurité alimentaire, mais aussi parce que sa grande diversité et le caractère très spécifique de certaines ressources génétiques marines (prélevées dans les régions polaires ou les sources hydrothermales en profondeur par exemple) est à l’origine d’importantes découvertes, dans le domaine médical notamment. Cela pose des questions concernant l’exploitation des brevets.
Des négociations entre États sont en cours afin d’adopter un nouvel accord visant à compléter la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer adoptée en 1982, qui est considérée comme une véritable « constitution » pour les océans. Ce qui est reproché à cette Convention, c’est de ne pas être suffisamment précise concernant les modalités de conservation et d’utilisation durable de la biodiversité des zones maritimes internationales, c’est-à-dire des zones se situant au-delà de la limite de 200 milles nautiques (64% des océans, soit la moitié de la surface de la terre).
Le nouvel accord devrait permettre, par exemple, de faciliter la création d’aires marines protégées en haute mer. Il a également vocation à préciser les modalités de mise en œuvre de l’obligation générale de réaliser des études d’impact environnemental pour l’ensemble des activités menées dans ces espaces.De plus, il devrait préciser le statut juridique des ressources génétiques marines et les modalités relatives à leur exploitation. Cette dernière question cristallise des enjeux en termes d’équité entre pays développés et pays en développement. Les premiers souhaitent conserver un régime de liberté d’accès et d’exploitation des ressources génétiques, tandis que les seconds, ne disposant pas encore des technologies nécessaires, réclament un encadrement strict et un partage des bénéfices perçus de leur exploitation, à l’image du régime de patrimoine commun de l’humanité qui caractérise depuis 1982 la zone internationale des fonds marins. Les aspects économiques et environnementaux sont ainsi fortement liés.
D’autres discussions internationales sont actuellement menées au sein du Programme des Nations Unies pour l’environnement, concernant la question de la pollution des océans par les déchets de matière plastique. Les conférences relatives au climat, quant à elles, n’abordent quasiment pas le lien entre le climat et les océans, alors que l’ampleur des conséquences des changements climatiques sur ces derniers et le rôle qu’ils jouent dans la régulation du climat sont des problématiques également très importantes. »
Jean-Paul Pancracio,
Agrégé des facultés de droit, professeur émérite des universités, responsable de la rubrique « Questions maritimes et navales » de l’Annuaire Français de Relations Internationales (AFRI).
« Vers un océan mondial retrouvé » Vie Publique Novembre 2019
« Osons anticiper que le droit de la mer du XXIe siècle sera un droit fonctionnel transcendant limites et exclusivités.
Outre la probable persistance des zones maritimes et des découpages créés au cours du XXe siècle, ce sont les grandes fonctions maritimes assumées par les États et les acteurs intervenant en milieu marin qui devraient tendre à prévaloir : fonctions environnementale et de protection du milieu, de sécurité, de sauvegarde de la vie humaine, de gestion raisonnée des littoraux, de régulation de l’exploitation minière des fonds marins… fondées à l’échelle universelle sur des normes contraignantes permettant une gouvernance des océans.
L’évolution du climat global de la planète, la croissance démographique, la raréfaction des ressources halieutiques conjuguée à une demande accrue d’accès à ces dernières sont autant de défis qui ne seront affrontés qu’à ces conditions. »
Benedict Donnelly
Rochefort a accueilli début octobre les premières Rencontres des Mémoires de la Mer. Ces retrouvailles de Rochefort avec la mer, Erik Orsenna les avait appelées de ses voeux, dans la préface de son livre « Rochefort et la Corderie Royale », paru il y a plus de 25 ans :
« Toujours présente mais jamais visible, hantant les rêves d’autant plus qu’elle n’apparaît jamais, la mer est le grand amour impossible de Rochefort, le souvenir de l’âge d’or, le regret du large. Sinon la peur de l’Anglais, rien ne disposait la ville à devenir maritime. On a fait venir la mer au cœur des terres. Et, puis, un triste jour, après deux cent soixante ans d’Arsenal, deux siècles et demi de hauts, de bas, de passions contrariées, la nature a repris ses droits, l’amirauté ses billes, la mer s’en est allée. Voilà pourquoi Rochefort ressemble à ces êtres un jour touchés par un amour trop vaste : une fois l’aventure finie, il leur en reste, outre les blessures, une brillance immanente, une magnificence, la noblesse de ceux qui ont osé se surpasser. Que faire de la nostalgie ? Certains sombrent dans le culte et ne cessent de défiler en eux-mêmes comme de méticuleux anciens combattants. Rochefort a choisi l’énergie et sa musique : la gaieté. La mer est partie ? Eh bien faisons-la revenir. Les navires ont déserté ? On va en construire d’autres. Et de nouveaux départs d’aujourd’hui vont égayer les retours d’hier. Peu de vieilles cités ont à ce point tissé, en peu d’années, autant de liens avec les lointains; les gens sûrs de leurs racines sont les plus audacieux voyageurs. »