Pour Olivier Cena, jusqu’à la fin du 15ème siècle, la mer en tant que telle n’existait pas dans la peinture. Elle émerge en tant que paysage à part entière au début du 16 ème siècle.
Télérama août 2015
« Un jour, Joachim Patinir (1480-1524) inventa le Paysage. Ce faisant, il inventa aussi la Mer.
Au début du XVIe siècle, le grand peintre flamand en fit l’un des éléments essentiels de la composition de ses tableaux. Dans un paysage majestueux conçu comme un décor accueillant la scène biblique, un fleuve médian marque la séparation entre les malédictions (guerres, catastrophes, etc.) et le Salut. A l’extrémité de l’estuaire du fleuve, la mer et le ciel dessinent une ligne d’horizon. Et de l’au-delà de cet horizon, d’un soleil invisible provient la lumière blanchissant le ciel (La Traversée du Styx, v. 1524). La mer de Patinir sépare le ciel de la terre, le divin du profane.

En peinture, à la conception du monde répond une composition très précise du tableau. Jusqu’à la fin du Moyen Age, la mer est un signe : une petite surface bleue ou verte animée de lignes évoquant une onde sans écume. Avec Patinir, elle devient un élément symbolique, représentée en plongée comme si le regard de l’artiste se trouvait en hauteur. Cette vue aérienne fictive correspond à la nouvelle cartographie de la Renaissance qui développe l’aperçu « à vol d’oiseau » des territoires. »
A suivre…